Réforme du lycée

MODE D’EMPLOI

 

Depuis des années, des politiques dévastatrices, irresponsables et uniquement basés sur une logique budgétaire brisent le concept républicain de l’école pour tous. Suppressions de postes, d’options, surcharges de classes, ghettoïsation de certains établissements scolaires ; tous ces fléaux se sent abattus, tels une nuée de sauterelles, sur notre Education, issue directement du pacte républicain. Mais, trouvant surement que ces politiques irresponsables menées par des gouvernements conservateurs ne suffisaient pas encore à compromettre assez l’avenir d’une génération, Luc Chatel a proposé une réforme du Lycée superficielle qui st en fait un véritable manuel de destruction de l’Education !

Petit Inventaire :

  1. Construire une Education à plusieurs vitesses

Sous couvert de « mieux accompagner chaque lycéen », cette réforme entrainera surtout la création d’un lycée à plusieurs vitesses, mettant ainsi à bas le principe de l’Egalité des chances. En effet, en installant 2 heures hebdomadaires d’ »accompagnement personnalisé » pour chaque lycéen avec des « groupes [de] niveau », un fossé se créera entre les « bons » élèves et les plus « faibles ». Car, tandis que certains élèves combleront leurs lacunes, il sera proposé aux meilleurs des « perfectionnements ». Les « bons » élèves seront donc encore plus meilleurs et les plus faibles, un peu plus mais sans espoir de rattraper le niveau puisqu’il augmentera avec ces 2 heures. Autre exemple de l’Education à plusieurs vitesses ; les langues étrangères dont les « enseignements sont dispensés par groupe de compétence ». Plutôt que fonctionner par petits groupes avec des bons élèves en langue qui « tractent » les plus faibles vers le « haut », cette réforme propose un apprentissage des langues différencié avec des élèves qui progresseraient donc selon leur niveau. Bientôt on aura donc dans nos lycées des élèves avec un niveau très bon en langues tandis que d’autres seraient (presque) bilingues !

Le concept du lycée pour tous sera donc sacrifié sur l’autel de la réforme à tout prix.

  1. Supprimons l’Histoire, supprimons la culture et le recul !

Pareil à une dictature staliniste qui réécrivait l’Histoire qu’on enseignait voire qui la supprimait des classes, cette réforme commet une énorme erreur en ne rendant qu’optionnel l’enseignement de l’Histoire en Terminal S. En effet, l’Histoire-Géographie, pour tant d’ailleurs l’une des 3 seules matières au Brevet des Collèges (avec le Français et les Mathématiques), est un enseignement essentiel puisqu’elle offre aux élèves une culture très importante et, surtout, parce qu’elle enseigne les erreurs du passé pour qu’elles ne se reproduisent plus. On mesure donc les enjeux de la suppression de cette matière en Terminale S, rendant donc le recul optionnel pour une série comprenant environ la moitié des élèves de la voie générale. Martelant le « devoir de mémoire » dans les médias, brandissant des mesures farfelus et inefficaces pour le perpétuer (lecture de la lettre de Guy Mocquet, « parrainage » d’un enfant victime de la Shoah par chaque élève de CM2, …), ce gouvernement poignarde pourtant l’Histoire au nom de la « spécialisation des séries ».

  1. Supprimer des effectifs coûte que coûte !

Mais cette réforme poursuit aussi un objectif, dans la lignée des politiques menées depuis quelques années, la suppression d’effectifs. Cette fois, au lieu d’afficher des chiffres, le ministre a décidé de forcer ces suppressions par l’architecture du nouveau Lycée. En effet, l’idée même du tronc commun permet d’avoir un seul enseignant pour 2 voire 3 classes, donc se constituer des classes réunissant des élèves de différentes séries, tant que l’effectif total de l’ensemble ne soit pas supérieur à 35 élèves ! On comprend l’avantage de cette réforme d’avoir les mêmes heures par séries en Première pour l’Histoire-Géographie, les langues vivantes, l’EPS, l’ECJS. Ah économies tu nous tiens.

  1. Renforcer les inégalités entre les lycées

En vertu de la sacro-sainte autonomie des établissements, vecteur, selon ses partisans, d’une valorisation et d’une adoption à l’histoire propre de chaque établissement, les fameux accompagnements personnalisés seront propres à chaque Lycées et déterminés par les Conseils d’Administration. Une décision qui, comme on pourrait aisément le deviner, ne sera pas la même à Henri IV que dans un lycée de ZEP ! On verrait donc un accompagnement personnalisé d’excellence dans les Lycées de Centre-ville, une sorte de prépa à la prépa (puisque les « grands » lycées possèdent tous une prépa), et, dans les lycées de banlieue voire ruraux, 2 heures hebdomadaires avec « les moyens du bord », tout le monde n’ayant pas la chance d’avoir des professeurs de prépa à disposition ! On pourrait aussi trouver, ce n’est pas impossible, des lycées généraux « spécialisés ». En effet, des lycées où la série S est dominante pourront très bien n’axer leurs « accompagnements personnalisés » que sur les matières scientifiques et ce, dès la Seconde, anticipant la « spécialisation » de ces 2 heures hebdomadaires en terminale. Les grandes villes comprenant plusieurs lycées généraux pourraient dont se retrouver avec un lycée d’excellence en littérature, un autre d’excellence en sciences humaines, etc tandis que les villes moyennes n’auraient qu’un seul lycée de niveaux moyen par rapport à ceux des grandes villes.

Cette réforme ne règle pas aussi le problème des différences de choix d’options proposés dans les lycées puisqu’elle en rajoute pour la Seconde sans affecter les professeures correspondant dans les lycées. Ainsi, les lycées ruraux auront toujours autant peu d’options à proposer aux lycéens issus des villes et villages urbains auront, eux, un énorme choix dans leur ville. Inégalités renforcée par le fait que les « disciplines non linguistiques » ne seront proposées « en langue étrangère aux lycéens » qu’à « chaque fois que cela est possible ». Les grandes villes pourront donc se permettre d’avoir chacune un lycée tournée vers les langues, donc avec un maximum d’enseignements en langue étrangère, et les milieux ruraux auront un lycée où les langues ne seront dispensées qu’en cours de langue.

Cette réforme se fait donc au détriment du principe de l’Egalité des chances, en ouvrant la porte aux spécialisations des lycées, en renforcement du clivage ville/campagne, etc.

  1. S’arrêter à mis chemin, créant donc une réforme peu ambitieuse et superficielle.

Mais, la difformité de la réforme est générale. Craignant qu’une réforme ambitieuse rencontre trop d’oppositions, cherchant à construire un lycée avec peu de moyens, tentant de créer un lycée qui ne fâche ni les tenant d’une spécialisation à outrance, ni les partisans d’un socle commun à tous, M. Chatel a proposé une réforme difforme, mal adapté et peu pertinente.

Tout d’abord, au lieu de mettre enfin fin à l’inutile prolifération des acteurs de l’orientation (COPSY, ONISEP, professeurs principaux, CIO, CDI, …), cette réforme l’accélère en y ajoutant un voire 2 autres intervenants, le « tuteur » et « l’accompagnement personnalisé » qui, « sans se substituer au professeur principal ni au conseiller d’orientation psychologique », conseilleront eux aussi l’élève pour son orientation.

Aussi, tout en affichant la volonté de construire un « tronc commun » en Première, cette réforme supprime l’enseignement obligatoire des mathématiques en 1ère L, matière pourtant principale au DNB posant donc la question des véritables objectifs de cette réforme.

Enfin, alors que notre système scolaire est l’un des plus inégalitaire de l’Union Européenne (il a été d’ailleurs classé récemment au 25ème rang [sur 27 NdA] par une récente étude de l’OCDE), cette réforme ne s’intéresse pas à ce vrai problème de notre Education, symbole de la non-adaptation de l’école au monde moderne et à ses bouleversements.

C’est pour empêcher cette Casse de l’Education à coup de suppressions de postes et d’autonomisation non contrôlée des établissements que l’UNL-SGL 85 s’oppose à cette réforme et appelle tous les lycéens à se battre contre la réforme Chatel.

Et, afin d’obtenir l’Education la meilleure possible, nous militons aussi pour la constitution d’une réforme ambitieuse et pertinente du Lycée qui permettra à chacun, quelque soit ses origines, d’obtenir la réussite qu’il mérite.

 

NICOLAS Denis

Référent Fédéral du SGL85 et de l’UNL 85

Elu lycéen au Conseil Académique

de la Vie Lycéenne de Nantes et suppléant

au Conseil Supérieur de l’Education.